Suite et fin de notre série de portraits Travailleurs nomades. Après Gilles et Maggy, puis Philippe, c’est au tour de Christelle et Alexandre, alias Wait&Sea, de se livrer au jeu des questions-réponses. À nouveau, nous interrogeons leur choix de vivre et travailler sur la route, d’une manière encore un peu différente puisqu’ils ont traversé l’Atlantique il y a un an maintenant.
▪️Pouvez-vous nous dire en quelques mots qui vous êtes et nous expliquer en quoi consistent vos jobs de nomades digitaux ?
Wait & Sea : Bonjour Fourgon le Site, nous sommes Chrystelle et Alexandre, aka Wait&Sea, et nous avons 37 ans tous les deux. Nous sommes actuellement au Chili, en voyage sur le long cours.
Chrystelle : Je fais de la rédaction web depuis deux ans et je travaille à distance pour différents clients sur des sujets variés. Avant, je faisais du développement web et du SEO, deux activités que j’ai souhaité mettre de côté. En rentrant en France, j’ai très envie de développer la photo tout en gardant la rédaction web comme seconde activité. Je veux également devenir accompagnatrice de moyenne montagne et combiner ainsi les activités de sortie photo avec la randonnée.
Alexandre : Avant de me lancer sur les routes, j’étais développeur de logiciels web. Aujourd’hui, je travaille pas mal sur notre blog (Wait&Sea) tout en cherchant à développer ma propre activité en parallèle.
▪️Quelles sont les raisons qui vous ont conduit à devenir « nomades digitaux » ?
Wait & Sea : Au départ ce n’est pas l’idée de travailler en voyageant qui nous motivait. Nous avions ce projet de voyage en Amérique du Sud depuis des années. Mais pour réaliser ce voyage au long cours, il fallait que l’on modifie notre mode de vie.
Chrystelle : J’ai d’abord décidé de quitter le salariat et de me lancer à mon compte. Pour autant, j’ai voulu passer par une coopérative d’activités (ou SCOP) pour être accompagnée et prendre mon temps. En tout, cela a pris un an et demi. Pour vivre et voyager en même temps, il faut évidemment trouver des clients qui acceptent un contrat à distance. La rédaction web me semblait donc être le moyen le plus simple et le boulot le plus facile à gérer dans ces conditions. Pour ce qui est du côté photo, je souhaite développer cette facette et construire différents projets pour la suite.
Dans les faits, tout s’est construit en parallèle. La création de mon activité, l’achat du van et son aménagement. Dans les six mois qui ont précédé notre départ, tout s’est mis en place petit à petit.
Quant à notre camion, nous l’avons voulu 4×4 et adapté à nos besoins spécifiques sur les routes d’Amérique du Sud. Nous avons fait tout l’aménagement nous-mêmes en tenant compte du fait que nous aurions besoin d’un espace de travail.
▪️Quels sont les avantages à travailler et vivre sur la route ?
Wait & Sea : Pour nous, l’avantage premier c’est la liberté. C’est évidemment un gros plus pour les voyageurs d’avoir la possibilité de travailler de n’importe où. Être nomade digital se résume à avoir besoin d’internet et d’un lieu où poser son ordinateur. Comme notre maison est notre van, c’est évidemment l’endroit parfait ! Après, il suffit d’organiser sa vie autour de ce point central : il faut un accès à internet et du temps à réserver à son activité professionnelle.
▪️De quel budget mensuel avez-vous généralement besoin ?
Wait & Sea : Tout dépend de la manière dont on voyage. En pratique, même s’il n’y a plus de loyer à payer, il y a toujours des frais incompressibles. Internet, bien sûr, mais aussi le carburant, qui constitue une bonne part du budget, très variable selon les distances parcourues. Pour nous, selon le pays dans lequel on se trouve, cela peut monter à 600 €.
Coté nourriture, tout dépend encore du pays et du coût de la vie. En van, on cuisine sans faire de stock. En réalité, nous avons quasiment le même budget que lorsque nous étions sédentaires. C’est un domaine dans lequel on n’hésite pas à se faire plaisir.
En tout et pour tout, il nous faut entre 500 et 1000 € par mois à deux. En étant nomades, on fait moins de sorties payantes, moins de restaurants et moins d’activités annexes. Le sentiment de liberté que nous procure le van fait que nous n’avons pas besoin d’aller chercher d’autres distractions.
▪️Tout n’est pas rose, quels inconvénients y voyez-vous ?
Wait & Sea : La vie en van, c’est super quand tout va bien. Le moindre problème rend les choses plus compliquées. Il faut penser à la sécurité, aux éventuelles contraintes mécaniques et à la météo. L’hiver en van est une période très difficile à appréhender. Voilà pourquoi beaucoup de personnes ne vivent dans leur fourgon qu’une partie de l’année.
Et puis la vie en van n’est pas toujours bien perçue et il arrive que l’on ne soit pas les bienvenus. À l’étranger, on ne vit pas les choses de la même manière. Il y a parfois un décalage du simple fait d’être dans un autre pays que le sien et de devoir parler une autre langue.
La mécanique reste un des gros points noirs de la vie sur la route. Le van étant notre maison, s’il y a un problème mécanique, il n’y a aucun moyen de repousser l’échéance. Il faut réparer et c’est parfois un gros budget.
Et puis si on travaille sur la route, on est également dépendant de l’accès à internet. Cela peut parfois restreindre nos mouvements. Pour tenir ses échéances, il peut arriver que l’on doive passer du temps dans des lieux pas très glamour juste pour travailler, que ce soit une station-services ou parking avec wifi.
▪️Comment vous voyez-vous dans 5 ou 10 ans ?
Wait & Sea : On ne se voit pas nomades sur les routes à long terme. Cela a toujours été pour nous une envie à court terme, une aventure limitée dans le temps dont on veut profiter. Après, on aura un terrain et on fera de la permaculture, tout en gardant le van comme un à-côté. On vivra dans la maison que nous aurons construite et on voyagera aussi à vélo.
Nous voulons être autonomes au maximum et vivre de manière très locale mais ne pas passer notre temps à travailler pour retrouver du temps libre dans notre quotidien.
“Être freelance, c’est monter sa petite entreprise ;
ça reste risqué et souvent stressant.”
▪️Quels conseils donneriez-vous à des personnes qui voudraient se lancer dans ce mode de vie ?
Wait & Sea : Ne pas se faire de film ! Être nomade digital, ce n’est pas la réponse à tout. Il faut essayer, mais cela ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut se former, développer des compétences, savoir démarcher, avoir des clients, faire de la compta. Ce n’est pas parce que c’est internet que c’est l’eldorado.
Pour ce qui est de la vie nomade, il faut avoir un véhicule adapté, avec un coin confortable pour travailler. Travailler dans son lit, ce n’est pas évident. Il faut aussi avoir une certaine autonomie en électricité.
Finalement, la meilleure façon de savoir si cela nous convient, c’est de le tenter tout en étant conscient que ce n’est pas toujours rose. On galère tous et c’est normal. Les gens le disent rarement mais être nomade digital, ce n’est pas que ce que l’on voit sur les réseaux sociaux !
Suivre Chrystelle et Alexandre sur Instagram et sur leur site Wait&Sea.