La question peut surprendre, mais elle se pose à la veille des vacances d’été qui devraient confirmer l’incroyable succès des voyages itinérants en vans aménagés, à l’heure du tourisme de proximité. Les loueurs anticipent déjà une forte activité.
« Confirmant les bons résultats de cet hiver, les prises de réservation pour l’été 2021 sont en hausse de 89% par rapport à 2020. La tendance qui se dessine suit celle de l’an dernier. Néanmoins, les particuliers anticipent davantage dans un marché contraint par une offre réduite de véhicules à disposition » annonce Augustin Boyer, cofondateur du réseau de location WeVan qui enregistre dix nouvelles agences depuis 2021.
Même son de cloche du côté des grandes plateformes européennes de location, comme Indie Campers ou Road Surfer. Pas de doute, il y aura du monde à musarder, le nez au vent.
Un confort simple
La plupart des petits véhicules en location ne disposent pas de toilettes à bord. La culture originelle du van favorise un confort simple, à minima, libéré des habitudes domestiques, à l’inverse du camping-car qui reproduit tout l’univers de la maison. La vie en van, c’est d’abord une vie au-dehors, ouverte sur l’extérieur. Ce qui n’interdit pas l’installation d’un WC portable.
Les exigences des clients évoluent et participent à l’arrivée d’une nouvelle génération de véhicules équipés de WC fixe, dans le sillage d’un Stylevan 3006 (actuel Austral IV) ou d’un Campérêve Mirande. Ils ont été rejoints par d’autres propositions, comme le Font-Vendôme AutoCamp XL.
Si les utilisateurs aguerris s’accommodent très bien de l’absence de WC et déploient des stratégies alternatives (VOIR LES CONSEILS), les néophytes semblent plus circonspects. La question est centrale et constitue le principal sujet d’inquiétude pour les acheteurs et les locataires. Comment se passer de toilettes à bord ?
« On leur propose en option un kit de toilettes sèches, mais ils ne l’utilisent que rarement. Un kit sur deux nous revient dans son état d’origine. Quoi qu’il en soit, nous faisons un gros travail d’éducation et de sensibilisation au respect de l’environnement au moment du départ » détaille Joseph Teyssier, cofondateur du réseau WeVan.
La possibilité d’improviser ses étapes, sans réserver de chambre à l’hôtel ou une place dans un camping, ne saurait justifier des débordements et les mauvaises pratiques. Au contraire. Pour les voyageurs, la règle d’or s’impose : ni détritus, ni nuisance. Les Nord-Américains font la promotion d’un message clair et sans ambiguïté : Leave no trace (LNT).
« Des vignerons accueillants nous rapportent des incivilités inacceptables, comme des papiers hygiéniques retrouvés entre les rangs de vignes. C’est désolant » regrette avec tristesse Marc Guillermain, du réseau France Passion. La structure œuvre depuis près de 30 ans pour favoriser l’accueil des véhicules itinérants et autonomes sur les exploitations et domaines privés.
Alors, comment faire ? Faut-il imposer des WC dans les vans qui en sont dépourvus ? En France, le débat pourrait s’animer durant l’été, face à la montée inexorable des véhicules en circulation et des tensions qui peuvent en résulter en certains lieux. LIRE AUSSI : Stationnement : un été 2021 sous tension ?
L’exemple de la Nouvelle-Zélande
Profitant du reflux touristique lié à la pandémie, la Nouvelle-Zélande, l’autre pays du van, réfléchit ouvertement à rendre obligatoire les toilettes dans l’ensemble des vans. Dans un rapport d’avril 2021, elle rappelle la forte croissance du nombre de voyageurs nomades pratiquant le camping libre défini par la loi : « Ils sont passés de quelques dizaines de milliers au début des années 2000 à 245 000 pour l’année civile 2019. Environ 154 000 étaient des visiteurs internationaux (63 %), le solde étant représenté par les résidents néo-zélandais. »
Cette forte croissance, parallèle à celle du nombre de visiteurs (+ de 3 millions de visiteurs), n’est pas sans conséquence. Le ministre du tourisme prend position : « Les comportements de certains campeurs qui parcourent notre merveilleux pays dans des véhicules équipés d’une plate-forme de couchage mais sans toilettes ont mis à mal l’accord collectif entourant la pratique du camping libre et notre capacité à tenir la promesse de notre marque 100% Pure Nouvelle-Zélande. Cela doit changer. »
Parmi les quatre propositions soumises à discussion, il est proposé d’ouvrir la pratique du camping libre aux seuls véhicules certifiés autonomes. En d’autres termes, cette mesure exige l’installation d’un équipement sanitaire permanent.
La France n’est pas la Nouvelle-Zélande. Le pays est maillé de structure d’accueil et de toilettes à disposition sur la voie publique. (Voir l’application : Toilet Finder)
Pour autant, on ne pourra éluder le débat sous la pression des discussions entourant la gestion des déchets et la préservation des sites naturels. Pour l’instant, les critères définissant un camping-car n’incluent pas les équipements sanitaires et la récupération des eaux grises. Au-delà de répondre à des normes d’aération et de ventilation, ils doivent disposer d’une table, d’un couchage, d’un coin cuisson et de rangements. Basta !
« Les équipements en plus ne règlent pas le problème, mais le déplacent et le renvoient à des traitements chimiques. Ce n’est pas mieux. Avec We Van, nous militons pour des toilettes sèches d’appoint, en dépannage » précise Augustin Bouyer, du réseau de location WeVan.
LIRE AUSSI : Ils ont adopté des toilettes sèches à bord de leurs fourgons.
Alors, pour ou contre l’obligation d’installer des w-c. dans les vans ? Les avis seront forcément partagés. De toute évidence, il est facile de s’en passer sans se comporter comme un dégueulasse !
Comment chier dans les bois
Dans leur récent ouvrage sur la France en Van (Tome 1 – de la Bretagne à la Corse), les deux voyageurs Chloé et Gürkan dispensent de petits conseils de bons sens sur la manière de passer la nuit en pleine nature. Leur véhicule n’étant pas équipé de WC, comme beaucoup d’autres voyageurs nomades, ils utilisent les toilettes publiques lorsqu’ils en croisent ou creusent un trou dans la nature, le cas échéant. « Jamais en bordure de chemin ni à moins de 100 m d’un point d’eau » écrivent-ils dans leur guide. « Plutôt que de laisser les papiers à la vue de tous, jetez-les dans une poubelle ». Ajoutons qu’il existe aussi des kits de transport contenant un activateur bactériologique pour ne rien abandonner sur place.
Si le sujet vous inspire et vous donne envie de pousser plus loin… la réflexion, il faut lire : « comment chier dans les bois » de l’auteur américaine Kathleen Meyer ; un ouvrage culte, instructif et sans tabou, paru aux éditions Edimontagne en 2002. Un chapitre complet est consacré à l’art de creuser un trou au bon endroit. Tout un programme.