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Dur retour sur terre pour les aménageurs de vans à toit relevable, après l’euphorie des années post-Covid. Le marché se contracte et les stocks gonflent… Longtemps malmenés par des délais à rallonge, les clients se retrouvent en position de force pour négocier.

Patatras

Présenté comme le grand gagnant de la pandémie, le marché du camping-car a profité d’une embellie et d’une médiatisation sans précédent en 2021. Pour la première fois en France, les immatriculations de véhicules neufs franchissaient la barre des 30.000 unités.

Moins de trois ans après, patatras. La fête semble bel et bien finie. Sur les points de vente, les stocks de vans aménagés s’accumulent et les clients se font attendre…

La concession Idylcar La Roche-sur-Yon annonce la couleur : GROSSES PROMOTIONS SUR LES VANS CROSSCAMP ! Jusqu’à 10.000€ de remise sur les véhicules neufs en stock.

Déstockage en urgence

« Au cœur de l’hiver, nous avons pris peur, car toutes les commandes en souffrance sont arrivées en même temps sur les concessions. Inévitablement, ça a créé un engorgement sur les parcs » confie Emmanuel Guinhut, directeur général de Libertium Ouest.

Pour s’en rendre compte, pas la peine d’aller bien loin. Il suffit de consulter les sites d’annonces en ligne : 220 modèles de vans à toit relevable sur le réseau national Idylcar. Ce n’est pas mieux sur la plateforme Libertium, où les Bürstner Playa (Renault Trafic) et Bürstner Copa (Ford Custom) se hissent en tête du palmarès des annonces (83  référencées).

Signes d’une tension réelle, les commentaires sont franchement peu amènes chez certains distributeurs, contraints de déstocker en urgence de nombreux véhicules. « Début janvier, nous avions 25% de véhicules en plus sur parcs par rapport à janvier 2019. On ne peut pas dire que la situation actuelle soit comparable à celle d’avant Covid, comme on l’entend parfois. Les constructeurs sont déconnectés des réalités du terrain » s’agace un responsable de réseau.

Daniel Seisenberger, le directeur des ventes de Bürstner France, évoque de son côté le retournement brutal de la conjoncture. « Nous avons livré ce que les distributeurs nous ont commandés durant une période marquée par une crise de l’offre. Tout le monde réclamait des véhicules. Jusqu’en février 2023, les prises de commande étaient énormes. Six mois après, tout s’est écroulé. Et pas seulement en France, mais sur l’ensemble des marchés en Europe ».

Arrivé très tard en concessions, après tous les concurrents, le nouveau Bürstner Playa peine a trouver son public. Les annonces se multiplient.

Des occasions récentes

Auparavant seules sur un marché confidentiel, les marques historiques (Stylevan, Westfalia, Volkswagen, JCG Créations, Hanroad, Reimo…) doivent maintenant composer avec de très nombreux concurrents, parmi lesquels de grands industriels mais aussi beaucoup de petits aménageurs en prise directe avec les acheteurs.

Plus étonnant, personne ne semble en mesure de dire combien pèse le marché du van aménagé en France. Plusieurs sources évoquent un chiffre inférieur à 3000 immatriculations par an, soit moins de 12% du total des camping-cars (23696). D’autres, plus généreux, poussent le curseur jusqu’à 5500 vans en France. L’UNIVDL ne dispose pas de statistiques précises sur ce segment, confondu avec celui des fourgons.

Autre singularité, ce marché du van aménagé reste très dépendant des loueurs de VDL qui absorbent une part importante de la production. En l’espace de 5 ans, Roadsurfer est passée de 25 à 5000 campervans à la location…  Même constat chez Indie Campers, dont la flotte atteindrait 6000 véhicules.  Après leur exploitation durant une période variable (11 mois en moyenne au sein du réseau We Van), ces véhicules récents se retrouvent sur le marché de l’occasion face à des véhicules neufs. La plateforme WeVan Market recense 30 modèles (VW California, Ford Nugget, etc.) disponibles immédiatement et près du triple sous six mois. Les clients ont l’embarras du choix.

Des capacités de production en forte croissance

Pour tenir compte du coup de frein sur les ventes, les usines ont réduit les cadences de production, après avoir tourné à plein régime durant deux ans, au détriment parfois de la qualité…

En Europe, les capacités sont au plus haut. À elle seule, l’usine Mediterraneo VDL (Trigano), basée en Espagne, est en mesure de fabriquer 4500 vans par an.

Positionné très tôt sur ce marché du van à toit relevable, le groupe Rapido se revendique comme le deuxième acteur en Europe, derrière Volkswagen, avec plus de 10.000 véhicules produits (soit 30% du marché européen). Une part de ce chiffre est réalisée en tant que fabricant d’équipement d’origine (OEM) pour le compte de Mercedes et Ford. Rapido dispose de plusieurs unités, dont l’une se situe en France, à Benet (85). Y sont réunies les productions de marques à forte notoriété, comme Westfalia, Campérêve, Stylevan et Dreamer.

La saison dernière, ce sont plus de 4500 vans qui ont été produits au sein de Mediterraneo VDL (Trigano) à destination des différents marchés européens. Un vrai poids-lourd du secteur !

Des prix élevés

Malgré un frémissement au printemps, l’attentisme semble de mise chez la plupart des clients, totalement déboussolés par une offre pléthorique et des prix élevés. Certains professionnels le reconnaissent ouvertement.  « Au fil des augmentations, directement imputables aux fournisseurs de châssis, plus de 20% en deux ans, nous avons franchi un plafond de verre. La plupart des clients ne veulent pas aller au-delà d’un prix qu’ils jugent acceptable. N’oublions pas que nous sommes sur un secteur où la phase d’achat prend du temps, parfois deux ou trois ans. A ce titre, il faut revenir à des prix stables et non des variations brutales comme par le passé qui brouillent les cartes et disqualifient une part importante des acheteurs en neuf » précise Thibaud Renard (Hanroad).

Au bout du compte, les écarts de prix se sont considérablement réduits entre un camping-car traditionnel et un van aménagé à toit relevable. La situation devient illisible pour beaucoup d’acheteurs.

De bonnes affaires

L’intérêt pour le van aménagé n’est pas totalement retombé. Si les clients peinent à franchir la porte des concessions, ils n’hésitent pas à venir sur les événements spécialisés qui rencontrent un large succès : près de 22000 visiteurs en trois jours au Camper Van Week-End de Brissac.

Certains distributeurs n’hésitent plus à casser les prix, à grands coups de remises spectaculaires sur des véhicules neufs… Une politique commerciale pas forcément partagée par tous. « Nous ne voulons pas jouer sur ce terrain, car ce n’est jamais très bon sur le long terme. Ça dévalorise la marque et le produit » confie Vincent Perard (Panama), dont la marque continue de progresser dans les immatriculations. Sur le terrain, les concessionnaires gardent la main et pratiquent également des baisses de prix significatives.

Certaines marques, disposant d’une forte identité et d’une légitimité, tirent encore leur épingle du jeu. « Chez Reimo Eco Campers, on maintient les chiffres sur la concession de Toulouse et dans le réseau. A notre avantage, nous sommes parmi les derniers aménageurs à proposer des vans sur le Volkswagen T6.1, alors que la plupart des autres travaillent sur le Renault Trafic » analyse Olivier Descamps, directeur du commerce chez Eco Campers.

Une offre de location à petit prix pour tester la vie en van.

Des changements à venir

Quoi qu’il en soit, cette période de crise secoue le marché, mais sera sans doute salutaire pour le renouveau des pratiques et de l’innovation. Daniel Seisenberger, le directeur des ventes de Bürstner France, prédit des changements importants.  « Durant deux ans, tous les constructeurs ont géré les pénuries et les soubresauts de la production, sans revoir leur politique produit. Aujourd’hui, nous sommes tous contraints de le faire ».

Un renouveau également espéré par Augustin Bouyer, co-fondateur du réseau WeVan. « Ce coup de frein redonne du pouvoir aux clients. C’est douloureux, mais nécessaire. Il doit permettre d’assainir ce marché très spécifique ».

Les discussions portent aussi sur la manière d’aborder cette clientèle singulière qui échappe pour partie à la distribution traditionnelle du camping-car. « Sur de nouveaux produits, quand le réseau n’y croit pas, il ne faut pas hésiter à ouvrir de nouvelles portes » avance Daniel Seisenberger (Bürstner France).

De son côté, Vincent Perard (Panama) réclame un changement des habitudes de vente. « Aux concessionnaires, je leur dis souvent : n’attendez plus le client comme avant, prenez des initiatives, simples, pas chères, qui améliorent la visibilité des produits. Des pratiques assez courantes dans l’auto, mais trop peu répandues dans le véhicule de loisir ».

Un message partiellement entendu. Le réseau Panama se mobilise pratiquement à 100% pour faire découvrir à peu de frais le van aménagé au travers de l’opération « 2 jours/ 1 nuit de location à 99 € ». Une bonne manière de tester la formule et séduire peut-être de nouveaux clients.

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