Nous poursuivons notre série « fourgons & vans de légende ». Coup d’œil cette fois sur l’Odyssée 4000, le premier des camping-cars de la marque Chausson qui fête cette année ses 40 ans. Sorti en 1980, ce véhicule sur Peugeot J9 prend de jolis accents vintage.
En octobre 1980, le concert des clameurs qui accompagne l’ouverture du salon de l’auto de Paris ne couvre pas totalement les sourdes inquiétudes d’un secteur dans la tourmente, secoué par le second ” choc pétrolier “. Cette crise accélère les mutations et favorise les accords de coopération entre les entreprises.
Le boom du camping-car
Pressés de trouver de nouveaux débouchés, les deux carrossiers Chausson et Carrier s’associent au travers d’un GIE (groupement d’intérêt économique) et présentent au palais de la porte de Versailles l’Odyssée 4000, un fourgon aménagé réalisé sur le Peugeot J9, héritier du J7.
C’est leur première incursion dans un monde du camping-car encore balbutiant en France, mais promis à un bel avenir. Le « boom du camping-car » a déjà commencé chez nos voisins anglais depuis le début des années 70.
À chacun des deux partenaires, sa mission. Chausson s’occupe des modifications de la structure du fourgon, tandis que Carrier se charge de la partie habitation. Ne disposant pas en nom propre d’un réseau de vente, les deux partenaires confient la distribution à Peugeot.
Par chance et talent, l’Odyssée 4000 est esthétiquement bien né. Il dispose d’une rehausse de toit polyester double coque ajourée par de grandes fenêtres panoramiques. Les parois sont isolées et couvertes d’une peinture d’un gris métallisé, soulignée par un bandeau de couleur rouge très graphique.
Son style moderne et branché dans les canons de l’époque offre une poétique inédite au genre du véhicule de loisirs. Ce look vintage pourrait d’ailleurs encore séduire sans mal en 2020.
Une structure en échelle
Intercalée entre deux planchers, une structure métallique en échelle rehausse la zone de vie et l’aligne sur le niveau de la cabine. Le dégagement de toute la hauteur intérieure favorise l’impression d’espace et de volume. Le J9 est une nouveauté de l’année chez Peugeot, en remplacement du J7. Ses 4,90 m de long, 3,5 tonnes de ptac et sa charge utile de 2250 kg lui offrent de belles perspectives.
D’ailleurs, il propose 4 places route et autant pour les couchages dans un bon niveau de confort. Un chauffage électrique de 2000 Kcal/h assure une ambiance douillette à la mi-saison tandis qu’un chauffe-eau met en température les 110 litres de la réserve d’eau. Un avantage qui s’avère utile en cuisine et dans le cabinet de toilette où il est possible de prendre une douche !
Malheureusement, le dispositif de la douche dans un espace déjà encombré par le wc et le lavabo s’avère très peu pratique et le cloisonnement mobile peu étanche… Mais l’intention y est, ce qui n’est pas banal loin s’en faut dans un fourgon des années 80.
Une habitabilité étonnante
Les deux sièges passagers se trouvent regroupés en partie avant, au-delà de la porte latérale droite. Du coup, cet espace peut devenir, après mise à plat des dossiers des assises, un salon avec double dînette ou bien un couchage pour deux en position latérale. A noter enfin que dans ce génial compartiment avancé, les trois baies de pavillon assurent une formidable luminosité en même temps qu’une vue panoramique.
En partie arrière, la cuisine est disposée en long sur le côté droit comprenant un évier, un réchaud, un réfrigérateur, un chauffe-eau, une hotte aspirante et des placards de rangement ! Au fond, adossée à la cuisine, une penderie et dans la largeur restante, une banquette de 1,20 mètres. De l’autre côté, contre l’espace toilette, une nouvelle banquette plus étroite fait face à la banquette arrière. Entre elles, une table amovible vient alors constituer une deuxième dînette en alternance avec une configuration salon ou, après mise en place des éléments nécessaires, un deuxième couchage disposé cette fois-ci dans le sens de la longueur.
Premier des camping-cars Chausson, l’Odyssée 4000 est forcément resté dans les mémoires, mais sa carrière fut assez courte. Très vite, il est remplacé par l’Odyssée 4400, toujours conçu sur Peugeot J9 sous rehausse fixe. Ce qui change, c’est la disposition intérieure qui privilégie un coin repas central et la mise en place d’un couchage double sous pavillon au-dessus du salon. Suivront aussi plusieurs déclinaisons sur Renault Trafic (Bora) et le Renault Master (Taïga).
CHAUSSON, UNE GLORIEUSE HISTOIRE
L’aventure commence en 1907, dans un modeste atelier de chaudronnerie à Asnières dans les Hauts-de-Seine. À la tête de l’entreprise, les deux frères, Jules et Gaston, font preuve d’une belle maîtrise et perfectionnent les techniques et les moyens de production. Très vite, les commandes affluent de l’automobile comme de l’aviation.
Chausson se diversifie, rachète de petites entreprises, dont un fabricant de malle-Coquille en tôle emboutie, et se découvre des talents de carrossier. Il produit même de 1947 à 1964 des autocars de bonne réputation. Au début des années 70, de lourdes menaces planent sur l’empire familial, menacé par un éparpillement de l’actionnariat. Peugeot et Renault entrent au capital, sur fond de discorde entre les deux constructeurs… Chausson devient un domaine commun, mais sans but commun, selon la presse.
Le climat économique se dégrade et les licenciements s’accélèrent. Il faut vite trouver de nouveaux débouchés. Chausson s’aventure dans le véhicule de loisir en 1980, en partenariat avec l’entreprise Carrier. Les bons résultats l’invitent à poursuivre et à conclure un partenariat avec la SIR (société industrielle de Rochebonne, à Tournon-sur-Rhône), filiale de Trigano. Cette usine mise en service en 1976 produit déjà les caravanes de la marque Caravelair, rachetée en 1971 par Trigano. C’est ainsi que sortent les camping-cars Chausson Acapulco 44 et Acapulco 56. Le succès est au rendez-vous ! Cette première génération (1984-1990) se démarque par les parois à tôle blanche et les bas de caisse marron/rouge.
En 1990, création de la société « camping-cars Chausson » dans laquelle Trigano prend 49% des parts, avant de monter sa participation à 100%. Parallèlement, l’empire Chausson vacille et sombre. En septembre 1993, c’est même le dépôt de bilan… L’entreprise est vendue à la découpe. Renault reprend le site de Gennevilliers, où il assure l’emboutissage de ses véhicules utilitaires. Aujourd’hui, de ce glorieux passé industriel, ne subsistent que les camping-cars qui perpétuent le nom de Chausson.